Le dialogue politique prévu prochainement devra se pencher sur des points essentiels qui devraient transcender des questions simplement liées à notre système de gestion des élections.
L'histoire récente nous aura suffisamment démontré que notre dispositif électoral a des mécanismes huilés et résilients pour assurer et permettre des alternances et respecter ainsi la volonté populaire.
La perfection n'étant pas de ce monde, il est quand même nécessaire d'apporter des corrections en ce qui concerne la pléthore de partis politiques dont beaucoup parmi eux n'ont nullement une existence physique sur le terrain de même que le choix du bulletin unique qui peut aider à réduire drastiquement les moyens financiers servant à la prise en charge des scrutins.
Au delà de ces aspects, il faudra penser à mieux encadrer un accès parcimonieux de toutes les sensibilités politiques aux médias publics quand il ne s'agit pas de la période exceptionnelle des élections.
Restreindre le dialogue politique aux joutes électorales c'est se méprendre de l'essence de la politique.
Le conclave annoncé devra fondamentalement évoquer les récriminations sempiternelles de notre système de gouvernance. Parmi celles-ci figure en bonne place la retouche devant conférer au Président de la République une taille plus humaine des prérogatives qui lui sont dévolues.
Le passé récent nous renseigne des méfaits de l'hypertrophie de la fonction présidentielle. De par sa prééminence, il a eu la latitude d'enrichir de manière indue qui il voulait, il a châtié même à mort des personnes s'opposant à son insatiété de pouvoir et s'est adonné à des contorsions ayant mis à rude épreuve notre Etat de droit.
Le bon sens nous recommande de renforcer les contre-pouvoirs pour parer aux dérives monarchiques de tout éventuel élu à ce poste et cherchant à en abuser.
Les Sénégalais savaient que la corruption et la concussion étaient une réalité de leur quotidien mais le spectacle insoutenable qui se déroule sous leurs yeux et dont les chiffres donnent le tournis dépasse de loin les proportions auxquelles ils croyaient.
Notre système de gouvernance financière nous impose des mesures correctives et coercitives pour que nos deniers ne soient plus pillés de la sorte. Cela passera par de vraies réformes pour annihiler l'impact des desiderata des ordonnateurs de dépenses sur les gestionnaires. Il ne serait même pas de trop de placer les financiers du service public sous la tutelle directe du Trésor public et mettre ainsi fin à la pratique consistant à faire nommer le DAGE par le ministre ou le DAF par le Directeur Général. Les fonctionnaires appelés à gérer l'argent public à un degré élevé devraient être assermentés et mis davantage face à leurs responsabilités et qu'on leur permette d'aviser au plus au niveau en cas d'insistance de l'autorité pour toute requête non conforme à ce qui est légalement arrêté.
D'un point de vue technique, nécessairement il faut envisager une digitalisation qui offre un dispositif d'alerte pour contrôler à posteriori les engagements financiers de l'Etat.
Les bonnes réformes émaneront d'un diagnostic juste et dénué de complaisance pour arrêter les bonnes mesures. Il faudra beaucoup de courage pour secouer le cocotier et mettre en mal des pans entiers de notre administration confortablement assis dans leur zone de confort.
Ce dialogue politique ne devrait pas occulter la question de notre gouvernance foncière qui pose un souci d'équité et de responsabilité vis à vis des générations futures.
Le contenu de ce dialogue peut avoir des vertus transformatrices pour l'avenir de ce pays pourvu simplement que nous acceptions de mettre le curseur au bon endroit et éviter d'en faire des agapes politiciennes dont l'aspect cosmétique primera sur l'efficacité et l'efficience.
Le Sénégal doit changer et cela requiert de l'audace.
Le courage de décider est le moteur des grandes transformations.
Sarakhe NDIAYE